En finir avec Eddy Bellegueule d’Édouard Louis

J’ai trouvé ce livre juste, personnel, bien écrit, édifiant et pourtant, je n’ai pas pris beaucoup de plaisir à le lire. Je peine un peu à trouver l’adjectif pour décrire mon manque d’enthousiasme. Ennuyeux ? non, c’est pas ça ; trop glauque ? pas vraiment, c’est suffisamment habilement présenté pour ne pas tomber dans le misérabilisme exacerbé ; dérangeant, alors ? un peu, parce que l’histoire est assez banale mais elle ne peut laisser le lecteur de marbre 

L’histoire est celle d’un jeune homme au prénom a priori saugrenu étant donné son patronyme (d’ailleurs l’explication du nom est plutôt réussie), élevé dans la Picardie rurale et pauvre, dans un milieu familial violent, situé dans un environnement tout aussi violent et qui découvre son homosexualité dans la douleur et la solitude. Évidemment, dit comme ça, c’est du Zola version 2017, mais si je m’en tenais là, ce serait un peu caricatural, parce que ce livre est plus subtil.

On lit des scènes de vie dans lesquelles le père d’Eddy demande « C’est un mec ou une merde ? Il pleure tout le temps, il a peur du noir, c’est pas un vrai mec », ses bourreaux d’école lui infligent les pires humiliations, sa sœur essaie de le rapprocher de son amie, dans un scénario foireux par excellence pour Eddy et Sabrina, et sa mère lui offre une veste « rouge et jaune criard, de marque Airness », ce « cadeau de lycée » pathétique, qui finit à la poubelle.

On y trouve aussi des chapitres dont les noms n’évoquent pas vraiment un roman : « Les manières », « Vie des filles, des mères et des grand-mères», « Révolte du corps». Au fond, je vois ce livre plutôt comme une étude sociologique qui pourrait s’appeler « Homosexualité chez les jeunes issus d’un milieu défavorisé». J’y ai trouvé un peu de froideur académique et puis aussi un côté « confession » qui m’est désagréable parce qu’il n’y a rien à confesser, justement. Certes, il est intéressant et souvent bouleversant de lire des témoignages de personnes qui se « livrent » mais j’ai l’impression de n’avoir rien lu de très nouveau. Mon problème n’est pas que tout cela n’est pas bien  joyeux, mon problème est que ce chevauchement vécu douloureux/analyse comportementale et sociale ne facilite pas la lecture.

 

Bon, ce n’est pas un livre à lire au coin du feu dans sa chaumière, voilà tout.

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